Philomus

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D’une phrase tirée d’une nouvelle de Hervé Le Tellier

 

« Lorsque la charmante mademoiselle M. expliqua au docteur Walter qu’elle désirait rompre avec lui, et que d’ailleurs elle le quittait, ciao, le docteur Walter vit son univers s’effondrer en toutes petites paillettes autour de lui. »

 De 8 mots extraits de la même nouvelle, enregistrés à une minute dintervalle, écrivez le début d’une histoire qui commencerait par la phrase ci-dessus et qui intégrerait, au fur et à mesure et dans l’ordre, les 8 mots donnés.

 

  Lorsque la charmante mademoiselle M. expliqua au docteur Walter qu’elle désirait rompre avec lui, et que d’ailleurs elle le quittait, ciao, le docteur Walter vit son univers s’effondrer en toutes petites paillettes autour de lui. Quoi, il n’aurait plus le loisir de contempler ses tenues excentriques, touches de couleurs, dans sa salle d’attente morose. L’air y était vicié et son parfum de jeunesse était aussi mordant qu’un croissant pour l’estomac d’un affamé.

 Là, chaque jour à sa porte, toute la misère du monde mais à portée de sa main toute la fraîcheur du monde. C’était un système de balancier bien huilé qui lui permettait de tenir. Pour un malade, un sourire ; quoique même celui-ci  était du domaine du souvenir. Il ne fallait pas qu’il devienne amnésique parce qu’avec ces masques qui poussaient comme des champignons, il n’était plus prêt d’apercevoir l’esquisse d’un sourire.

 Nous étions dans le monde de la distanciation et de la contagion. Chacun était un suspect pour l’autre, il suffisait de presque rien, une petite toux, un postillon et c’était la Bérézina. Les salles d’attente dégorgeaient d’individus…

 Les malades et les angoissés, voilà à quoi était réduite notre société. Alors, le priver de Mademoiselle M, de cet aura de joie et d’ivresse qui le parcourait à chacune de ses apparitions, il n’en était pas question. Mais le malheur s’ajoute au malheur, à croire qu’il était tombé dedans quand il était petit.

 La vie n’est pas déjà assez difficile ? Pourquoi refuser à un homme le seul électrode capable de lui donner encore la force de se lever chaque matin et de se dire, oui, ça en vaut la peine.

Ah Mademoiselle M, tout un paysage mystique. Mais voilà le destin est cornu et comme le diable, il s’amuse de son sujet. Plus de vision matutinale, juste la sombre perspective de la maladie. Le temps est une horloge et ses jours étaient maintenant comptés. À quoi bon vivre. Il n’était pas Charlemagne et il n’avait rien conquis dans sa vie. Comment pourrait-il espérer un tant soit peu s’ériger contre les volontés de cette demoiselle.

 Il était plutôt du côté de Don Quichotte. Son moulin à vent, à lui, c’était le coronavirus. Abandonné, esseulé. Comment un chevalier pourrait-il combattre un tel fléau sans sa Dulcinée.

 

Flora Pourcelot  (11 avril 2020)



08/06/2020
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